L'historique :

Le Château de Groussay a été construit en 1815 pour la Duchesse de Charost, la fille de Madame de Tourzel, gouvernante des enfants du roi Louis XVI et de Marie-Antoinette. Racheté en 1938 par Charles de Beistegui, esthète inspiré, Groussay s'aggrandit en 1952 de deux ailes dont l'une conduit au théâtre et de "Folies" ou fabriques conçues avec la complicité des artistres Emilio Terry et Alexandre Serebriakoff et des architectes Desbrosses et Costi. La transformation du château et la création de "fabriques" se sont porusuivies jusqu'à la mort de Charles de Beistegui en 1970. L'ensemble est classé monument historique depuis 1993. 

Le château de Groussay avant que Beistegui n'y ajoute les ailes 

Ch�teau de Groussay ?  sa construction

 

 

 

 

 

 

 

 

L'histoire de Charles de Beistegui :

Charles de Beistegui naît en 1895 d'une famille d'origine basque, émigrée au Mexique au XIXème siècle, où elle fait fortune dans les mines d'argent. Carlos de son nom de baptême, "Charlie" pour les intimes, Beistegui fait ses études au collège d'Eton en Angleterre, pays dont le goût et l'art de vivre l'influencera énormément. Jeune homme il entreprend avec son frère un tour du mondede plusieurs années, qui le conduit dans toute l'Europe, mais aussi en Inde qu'il parcourt dans un wagon prêté par le vice-roi, et en Chine d'où il rapportera des recueils de poêmes illustrés de sa main.

Son oncle, mort en 1953, a réuni une grand collection de tableaux de maîtres dont il a légué une partie au Musée du Louvre, donnant ainsi son à l'une des galeries de la célèbre institution. Elégant et distant, l'oeil bleu azur, invité permanent d'une société cosmopolite, vouageant de Londres à Madrid en passant par l'Irlande ou Venise, il hérite d'un hôtel particulier que ses parents possèdent à Paris, rue Constantine. Esthète inspiré, amateur de poésie, il es passionné, au point d'u perdre sa fortune, par la création et l'aménagement de lieux qui vont façonner sa légende, en même temps que la conception d'un goût audacieux néoclassique et baroque baptisé dans le monde entier le "goût Beistegui".

Dans les années trente, influencé par ses amis Charles et Marie-Laure de Noailles, qui commandent à Mallet-Stevens une villa cubiste à Hyères, il sacrifie à la modernité et n'hésite pas à demander à Le Corbusier, à l'aube d'une carrière prometteuse, de concevoir sous ses instructions très dirigistes un appartement futuriste sur les Champs-Elysées. Escalier blanc en colimaçon, terrasse tapissée de gazon et décorée d'une cheminée rocaille, meublée de mobilier Louis XV, Beistegui conjugue le modernisme de Le Corbusier avec son goût déjà surréaliste : toutes les baies vitrées donnant sur les Champs-Elysées fonctionnent électriquement. Il parvient à créer, malgré des négociations tendues avec Le Corbusier, un pot-pourri étrange et original. Son noyau d'amis se constitue : l'écrivain Jacques de Lacretelle, les Noailles, Salvador Dali, Nathalie Paley. Le photographe Cécil Beaton raconte dans ses Mémoires qu'on n'a rien vu de plus extravagant depuis Louis II de Bavière. Mais Charles de Beistegui ne flirte pas longtemps avec les architectes contemporains. Il rêve d'un lieu disponible pour édifier un hymne au néo classicisme revisité qui sera jusqu'à sa mort sa marque de fabrique.

beistegui en gondoleEn 1938, Jacques de Lacretelle, qui possède une maison à Montfort l'Amaury dans les Yvelines, village historique à 45kms de Paris (chanté par Victor Hugo, habité par Maurice Ravel, fréquenté par Colette, Paul Morand et quelques autres) lui signale que le château de Groussay est à vendre. Ancienne propriété de la Duchesse de Charost, fille de Madame de Tourzel, gouvernante des enfants de Louis XVI et de Marie-Antoinette, Groussay, entouré d'un parc de trente et un hectares ceint de murs, ressemble alors à une maison de campagne du début du XIXème siècle. La bâtisse n'est pas encore classée monument historique et Charles de Beistegui apprécie cette liberté dont il usera pour la transformer radicalement en château, prolongé de deux ailes, d'un théâtre et d'une salle de bal dite "salle hollandaise"

Pendant la seconde guerre mondiale, alors que les événements ne semblent pas avoir prise sur ses projets, il entreprend une succession collosale de travaux qui ne s'arrêteront qu'à sa mort, en 1970 à l'âge de 75 ans. Il modifie les décors intérieurs du château de manière spectaculaire, au gré de ses idées, en créant une bibliothèque monumentale en acajou d'inspiration Anglaise ou le vrai rencontre le trompe l'oeil, une galerie habillée de tapisseries uniques conçues d'après les cartons de Goya, représentant les fêtes romantiques, présente au Musée du Prado à Madrid, un vaisselier inspiré des bibliothèques de Riesener, une galerie où se marient le style Louis XIII et les lustres hollandais, un théâtre de 240 places décoré d'étoffes flamboyantes et de lustres de Murano, sans parler des chambres d'amis, où les tissus anglais rivalisent de couleurs avec les tapis aux feuilles de lierre tout droit sortis de son imagination foisonnante et de celle de Madelaine Castaing. Ce ne sont pas les meubles estampillés et les tableaux de maîtres qui intéressent Beistegui, même s'il en possède d'exceptionnels, mais plutôt le mélange inattendu des bureaux russes de Roentgen, des lits empire, des bergères Louis XV et des poêles autrichiens. Il préfère de loin l'effet, le trompe l'oeil, le grand décor théâtral à l'authenticité parfois ennuyeuse des châteaux français. C'est à contre courant qu'il décide de border les fenêtres de la salle hollandaise de faïence de Delft bleu et blanc, de marier le vert et le bleu, de recouvrir les fauteuils de sa bibliothèque de cotonnade blanche et de créer des médaillons encastrés dans les portes en acajou, contenant exclusivement de fausses médailles en plâtre aux profils historiques.

Une vie extaordianire, faite de rencontres d'exception. Paris-Match écrira en 1957, sur un reportage concernant l'inauguration du thêatre de Groussay, que depuis Marie-Antoinette et le théâtre du grand Trianon, nul n'avait fait mieux que Charles de Beistegui. Le style "Charles de Beistegui" influence encore aujourd'hui de multiple architectes et designers et nous donne cette ouverture nécessaire à la liberté de créer.

Le Film "Le Bal du comte d'Orgel" de Marc Allégret (1970) avec son ami Jean-Claude Brialy, Micheline Presle, Ginette Leclerc et Claude Gensac fut tourné au château de Groussay et nous laisse aujourd'hui un témoignage d'exception, des décors imaginés par Charles de Beistegui.Durant sa vie, des personnalités comme :  Cécil Beaton, Christian Bérard, Jean Cocteau, Marcel Achard, Sacha Guitry, Paul Morand, Orson Welles, Marie- Laure de Noailles, Louise de Vilmorin, et tant d'autres, enrichiront cette vie dédié aux Arts. 

Citation de Jean-Louis Remilleux, propriétaire du Château de Groussay (de 2000 à 2010). Extrait de Groussay-l'Abécédaire des Châteaux : 

"Depuis que j'ai la charge de ce monument classé dont je me sens davantage le dépositaire que le propriétaire tant la vie humaine est courte devant les siècles d'histoire du patrimoine, je mesure la singularité du génie créatif de Beistegui. Groussay, ce sont le goût et l'audace d'un homme qui, toute sa vie, a transformé les lieux, échafaudé des projets, bousculé les convenances, imaginé un paradis, s'entourant d'artistes anticonformistes, dans le seul soucis d'approcher la beauté. Le tout pour son plaisir et celui de quelques amis dans un premier temps. Pour notre enchantement ? à tous, aujourd'hui."  


Photo: Charles de Beistegui à Venise.

construction du pont Palladien dans le parc de Groussay.

construction du pont Palladien